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Newsletter Alzheimer #2

Valorisation - newsletters

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10/02/2022

Suite au succès de la première newsletter et à vos retours (merci !), noussommes heureux de vous présenter la deuxième newsletter Alzheimer ! Au programme : les toutes dernières actualités de la recherche contre la maladie d'Alzheimer, une analyse d'un essai clinique de phase 3 et des retours d'expérience sur la valorisation de projets de recherche.

Bonne lecture !


Deux avancées dans la recherche d'un traitement

Le début du mois de juillet 2020 a été chargé en annonces dans la lutte contre la maladie d'Alzheimer : une demande d'autorisation de mise sur le marché aux Etats-Unis et le lancement d'un essai clinique de phase 3.

  • Le 8 juillet 2020, Biogen et son partenaire Eisai ont annoncé avoir déposé une demande d'autorisation de mise sur le marché auprès de la Food and Drug Administration. Elle concerne l'aducanumab, un anticorps dirigé contre les plaques amyloïdes agrégées, testé chez l'homme depuis 2012. Cette nouvelle est d'autant plus étonnante qu'elle survient après l'interruption précoce des essais cliniques de phase 3 (l'histoire en détails se trouve ci-dessous).
  • Ces deux mêmes sociétés ont entamé un essai clinique de phase 3 aux Etats-Unis pour tester l'efficacité de leur anticorps BAN2401 ciblant les protofibrilles bêta-amyloïdes. Le premier essai clinique réalisé sur cette molécule a maintenant dix ans.

On note que l’Europe est pour l’instant en retard !


Essais cliniques de l'aducanumab, échec ou réussite ?

En 2015, Biogen a démarré deux essais cliniques de phase 3 en parallèle, EMERGE et ENGAGE, qui devaient inclure un peu plus de 1600 patients chacun. Le design des études était similaire, à savoir des administrations mensuelles d'aducanumab à faible ou forte dose ou bien d'un placebo pendant soixante-dix-huit semaines. Le critère de jugement principal était le niveau de déclin cognitif et de l'autonomie des patients, mesuré par l'échelle Clinical Dementia Rating - Sum of Boxes. Ces études sont arrêtées précocement le 21 mars 2019 car une analyse intermédiaire réalisée sur 1748 participants prédit que les objectifs principaux ont statistiquement très peu de chances d'être atteints. Cependant, des données continuent à être collectées et une nouvelle analyse est réalisée sur l'échantillon prévu initialement de plus de 3200 patients. Celle-ci conclut à une efficacité significative de l'aducanumab à haute dose dans l'étude d'EMERGE, mais pas dans l'étude ENGAGE.

Que s'est-il passé ?

L'explication principale se trouve dans le design de l'étude et en particulier les changements de protocole. En effet, chez les patients APOEε4+, le traitement à la dose maximale de 10mg/kg pouvait provoquer des oedèmes cérébraux. Cependant, les symptômes cliniques associés sont peu invalidants (céphalées, étourdissements, nausées) et l’oedème disparaît spontanément dans les quatre mois. C'est pour cela que les patients APOEε4+ inclus dans l'étude avant la quatrième version du protocole recevaient une dose de 6 mg/kg (en violet sur le graphe ci-dessous) contre 10 mg/kg pour ceux inclus après le nouveau protocole (en vert sur le graphe ci-dessous).



D'autre part, l'étude ENGAGE a démarré un mois plus tôt que l'étude EMERGE et a inclus plus de patients APOEε4+ traités par l'ancien protocole qui ne permettait pas de dépasser la dose de 6mg/kg. Ceci a eu pour conséquences des doses d'aducanumab moyennes plus faibles que dans l'essai ENGAGE. En effet, 22% des patients ENGAGE ont reçu les 14 injections à 10 mg/kg contre 29% des patients dans l'étude EMERGE. On comprend ainsi les meilleurs résultats du second essai clinique. 

Ce graphe permet de visualiser le nombre de patients inclus dans chaque étude au cours du temps. Il est intéressant de noter que la majorité des données utilisées dans l'analyse intermédiaire proviennent de patients traités selon l'ancien protocole.


Dans le sous-groupe traité par la quatrième version du protocole dans l'étude ENGAGE, on remarque une tendance à l'amélioration de l'échelle Clinical Dementia Rating - Sum of Boxes chez les patients traités, mais celle-ci n'est pas statistiquement significative. Malgré ces résultats encourageants qui montrent notamment qu'une stratégie ciblant les peptides bêta-amyloïdes peut s'avérer efficace chez certains patients, il reste de nombreuses zones d'ombre à éclaircir. C'est pour cette raison que Biogen prévoit, en parallèle de la demande d'Autorisation de Mise sur le Marché, de réaliser un nouvel essai clinique en utilisant la dose de 10 mg/kg.

En conclusion, cet essai clinique souligne l'importance de la méthodologie et de la question clinique posée couplée à l'analyse statistique anticipée. Il est primordial de sélectionner une population de patients qui ne soit pas trop hétérogène et de définir une question clinique précise pour que l'étude puisse être interprétée.

Les résultats complets de ces essais cliniques sont accessibles dans ce diaporama de Biogen.

Après un tour d’horizon des projets avancés, retour vers le futur avec les perspectives de valorisation et comment anticiper les enjeux au plus tôt dans la vie d’un projet académique.

Entretien avec une chercheuse devenue entrepreneuse, Revital Rattenbach. 


Comment anticiper la valorisation dès le début du projet ? Entretien avec une spécialiste du sujet

Revital Rattenbach, fondatrice et présidente de 4P-Pharma


Bonjour Madame, pouvez-vous vous présenter rapidement ainsi que votre parcours ?


Je suis fondatrice et présidente de la société 4P-Pharma dont l’ambition et l’objectif est de développer des vrais traitements pour les maladies liées au vieillissement à partir des découvertes des chercheurs académiques. J’ai eu un parcours académique avec une thèse en biologie du vieillissement pendant laquelle je me suis intéressée au lien entre la trisomie 21 et les mécanismes cellulaires du vieillissement et en particulier la maladie d’Alzheimer. Après un post-doc, j’ai eu la chance d’être responsable de la valorisation de la recherche académique au sein d’un consortium européen. C’est ainsi que j’ai pu cofonder ma première entreprise, spin-off de Sorbonne université, et découvrir le monde de l’entreprenariat.


Quelles sont les spécificités à prendre en compte pour valoriser dans le domaine de la maladie d’Alzheimer ?

La maladie d’Alzheimer comme la plupart des maladies liées au vieillissement est multifactorielle en termes de facteurs de risque, de signes cliniques ou de symptômes. Il n’y a pas de corrélation claire entre l’imagerie en IRM ou des biomarqueurs liquides et les symptômes des malades. La population est hétérogène. Le meilleur « traitement » étant aujourd’hui les exercices cognitifs et l’entourage du patient.

Il va être donc très difficile d’évaluer les effets positifs d’un traitement sur l’évolution de la maladie. Ces limitations doivent être prises en compte dès le début du développement d’un traitement en essayant d’analyser très particulièrement quels sont les mécanismes ciblés par le médicament candidat et essayer de manière optimale de stratifier la population en essayant de prédire les meilleurs répondants au mécanisme d’action que ce soit au niveau du stade de la maladie, au niveau de biomarqueurs liquides ou d’imagerie communs.

Quelles sont les pistes de réflexion à privilégier selon vous pour cibler cette maladie ?

La recherche académique dans la maladie d’Alzheimer est très riche et pourtant aucune piste n’a permis d’apporter de solutions aux malades. Le nombre d’échecs en essais cliniques est gigantesque Plusieurs revues qui regroupent les pistes privilégiées jusqu’à aujourd’hui montrent que plus 70% des traitements testés en clinique ciblent les mécanismes liés à l’ab ou à tau. Depuis quelques années avec le développement de biomarqueurs, bien qu’ils ne soient pas encore validés, des recherches ciblent les mécanismes précoces de la maladie comme l’inflammation, les mécanismes de clairance de l’ab, les facteurs de risque comme la dépression ou encore le syndrome métabolique.

Avez-vous des messages clés à transmettre aux chercheurs quant à la valorisation de leurs projets de recherche ?

Lorsqu’un chercheur académique découvre une piste thérapeutique, il ne faut surtout pas qu’il hésite à la valoriser, les médicaments ont presque toujours comme origine cette recherche universitaire et/ou hospitalière. Cependant la recherche académique et le développement de médicaments sont des métiers très différents et demandent des expertises et expériences différentes. Le chercheur est indispensable pour les découvertes et la connaissance qu’il a acquise en travaillant sur la maladie ou sur la cible qu’il privilégie et sera toujours essentiel au développement du médicament. Pour améliorer les chances de succès il faut donc que le chercheur soit conseillé par des experts du développement pharmaceutique.


Nous espérons que cette deuxième newsletter vous a plu !

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